20170806_EL—PR_Supplice-Adm-FR__Nouvelle demande de grâce et consultation à propos des incohérences Droits de l’Homme

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Monsieur le Président de la République Française
Palais de l’Elysée
55, rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 PARIS – France des Droits de l’Homme

Contexte :
supplice administratif perpétré par l’Etat français depuis plus de 15 ans sur un handicapé (moi-même) ;
non-application de l’article L.246-1 du CASF (notamment) lequel implique une « obligation de résultats » ;
absence d’assistance, d’interlocuteur(s), de réponses, etc. ;
absence de fourniture des « aménagements raisonnables » prévus par les lois et conventions ;
refus de considérer les dérogations et mesures faciles à appliquer pour satisfaire la garantie du « meilleur état de santé mentale » auquel la France s’est engagée face à l’ONU ;
– etc.

 

Rio de Janeiro, le 6 août 2017

 

Madame ou Monsieur la personne du Bureau du Courrier de la Présidence de la République, qui va, à nouveau, se sentir offensée et classer ma lettre dans la catégorie « enquiquineurs », sans la transmettre aux seules personnes capables de la comprendre et de mettre fin à mon supplice (le Président, son épouse, ou le Conseiller Santé), je tiens à vous dire à quel point je suis désolé de vous déranger dans votre travail, en venant ramener, année après année, mes histoires de supplice administratif que personne ne comprend (ou ne veut comprendre). C’est des histoires de fous, non ?

Evidemment, si je ne fais pas « comme tout le monde », c’est de ma faute.

Je regrette sincèrement si je fais naître en vous comme un fugace sentiment de doute de culpabilité, aussitôt réprimé : vous travaillez à l’Elysée, vous avez donc raison, et moi je suis un misérable « administré », autiste (donc sans doute un peu malade) et exilé, autant dire rien du tout.

Aussi, c’est en tentant bien maladroitement de répandre à nobles vos pieds d’indignes torrents d’excuses et de repentir, que j’éviterai de vous agacer plus longtemps, et que donc je ne vous dirai pas à quel point il est dommage que vous participiez, par votre traitement « standard » d’un cas non-standard, et par votre Absence de Prise en Compte Correcte de l’Autisme, au maintien de la situation de supplice administratif que je vis, et qui perdure puisque les personnes compétentes ne sont pas averties.

Encore désolé ; j’espère que vous passez ou avez passé de bonnes vacances. « Cordialement » etc.

Ci-dessous, ma lettre pour le Président : inutile de la lire, j’ai déjà bien trop abusé (une page).

Bon, je l’écris tout de même, pour mes archives et pour mon futur livre « Lettres à des Moulins à Vent ».

Surtout ne vous dérangez pas : corbeille, comme d’habitude.

Pardon vraiment, pour tout ce tourment que je vous cause, là-haut tout là-haut dans vos bureaux à PARIS, à l’ELYSEE ! (Ca fait rêver, non ?)
Ah quel rustre, quel goujat je suis, d’ennuyer ainsi les braves serviteurs de l’Etat, moi le petit enquiquineur, l’autiste qui ne comprend rien, l’exilé, bref, l’immigré, le négligeable, le méprisable, l’excluable.

 

 

Monsieur le Président de la République, cher Emmanuel

Vu que vous ne lirez jamais cette lettre, je crois qu’on ne pourra pas me reprocher de « trop écrire », et donc je profite de cet avantage pour vous proposer deux sujets de non-lecture, parmi tant d’autres, ignorés avec la même superbe « républicaine » :

1/ Je demande grâce (c’est-à-dire cessation immédiate et définitive) pour MON supplice des injustices relatives à la gestion par l’Administration française du droit au séjour de mon ami-soutien-de-vie en tant qu’autiste.

Même si bien sûr vous ne lirez jamais, je voudrais tout de même pousser la délicatesse jusqu’à éviter de donner plus de détails dans cette lettre, afin de ne pas trop « fatiguer », si jamais quelqu’un a le « courage » de lire jusqu’ici. Et puis, pour tout vous dire, je suis épuisé de toujours ré-expliquer en vain.
(Dans le futur, les lecteurs ou lectrices curieux pourront connaître ces détails sur mon site ericlucas.org, ou dans les livres que je compte réaliser.)

2/ Etant tombé par hasard sur l’article 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, je n’ai pas pu m’empêcher d’être interpelé par l’apparente incohérence, par rapport au traitement qui m’est réservé actuellement par l’Etat français. De plus, c’est au prix d’un certain effort que j’ai réussi à me souvenir que cette Déclaration a une sorte de lien fondamental avec la France. Enfin, la France des gens normaux, bien sûr.
Les autistes, c’est à part, pas vrai ? Les Droits de l’Homme, ça ne veut pas dire grand-chose pour eux…
Bref, voici donc l’article qui m’a « choqué » au point de vouloir rédiger cette lettre :

Article premier
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.

Dans la première phrase, je me suis dit que ces deux choses n’étaient pas du tout respectées en ce qui concerne mon ami et moi. (Mais je ne vais pas expliquer, pour ne pas déranger.)

Dans la deuxième phrase, là c’est plutôt aux fonctionnaires que j’ai pensé, enfin, surtout à certains, ceux qui – bêtement, il faut bien le dire – maintiennent farouchement leur obstination contre toute solution humaine à ce désastre (15 ans de vie perdue, ce n’est pas rien).

Je suis désolé d’insister mais j’ai lu rapidement les autres articles, et en ce qui concerne

Article 5
Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

franchement, je n’ai pas pu m’empêcher de penser que je lisais une description assez fidèle ce qu’on me fait endurer (voir les deux mots en gras).

Bon voilà, c’est tout. Vous voyez, je ne vous demande même pas de commenter. Je fais vraiment tout ce que je peux pour vivre ma torture en dérangeant le moins possible. Juste quelques dizaines ou centaines de lettres chaque année : ce n’est pas bien méchant, puisque de toute façon personne ne les lit.
(Pardon si quelqu’un lit malgré tout : veuillez arrêter, vous avez des choses plus importantes à faire. Merci.)

Finalement, en sachant que les destinataires ne liront pas, c’est beaucoup moins exaspérant, et je ressens moins le besoin irrépressible de leur transmettre, par quelques remarques « sincèrement énervées » (mais « inadaptées », et jugées « désobligeantes »), un vague aperçu de ce que j’éprouve et de ce que je pense.

Ah, au fait, une amie m’a envoyé une photo qu’elle a prise aux toilettes de votre palais, avec des feuilles de plastique et les gens qui se baissent pour passer dessous, et de gros panneaux « attention danger, amiante », franchement, c’est pas sérieux, non ?
Donc, pour finir sur une petite note moins négative, moins triste, je me permets de vous envoyer un petit panneau de toilettes (que j’ai fait pour diminuer un peu ma souffrance), beaucoup plus sérieux dans sa conception, et moins inquiétant, que vous pouvez faire imprimer ou sérigraphier en plusieurs exemplaires, pour les distribuer aux Ministères de la République, comme le Ministère de l’Injustice, le Ministère du Mutisme et de l’Incurie, enfin tout ça (je vous épargne d’une liste qui pourrait « ennuyer »).

Ah et puis – pardon – encore une dernière petite chose : puisque cette lettre-morte (ou condamnée à mort) parle de « Déclaration des Droits de l’Homme », je ne puis m’empêcher de penser à celle de 1789, avec – vous savez – cet amusant article 15 (« La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. « )…
Nos ancêtres étaient vraiment de doux rêveurs…
A notre époque, il n’y a que les autistes pour croire encore à de telles calembredaines.
Oh et au fait, mille excuses encore pour avoir ennuyé des générations de fonctionnaires en ayant eu l’audace impardonnable de rappeler cet article dans mes lettres, depuis… au moins 20 ans je crois.
De me voir si méchant et ingrat, ça me donne presque envie de pleurer quand je pense à tous ces agents zélés et innocents que j’ai fait souffrir en les « harcelant » avec ces sornettes sans queue ni tête.
D’ailleurs, peut-être qu’il faudrait enlever cet étonnant article du préambule de la Constitution, non ?
Je sais bien que personne n’est dupe (ça va, j’ai fini par comprendre) mais ça fait un peu « désordre ».
Enfin voilà, juste quelques petites remarques esthétiques, et encore navré pour toutes mes lettres en vain etc. etc.

Allez, encore pardon et merci.

Et bien sûr, comme toujours, je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République de la France-pays-des-Droits-de-l’Homme-etc., cher Emmanuel, à l’assurance de ma respectueuse exaspération, mon profondissime écœurement, mon humble désespoir, ma « parfaite considération », etc. etc.

 

Eric LUCAS

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